Le continent africain est la région du monde où la technologie mobile a connu l’évolution la plus rapide en moins de dix ans. Le passage de la 2G à la 3G, puis à la 4G a été bien plus prompt en Afrique qu’en Europe ou aux États-Unis. Le déploiement progressif de la 5G en Afrique, – bien qu’il en soit encore à ses balbutiements, y compris dans le monde -, vient également souligner le haut potentiel technologique du continent. Cependant, la GSMA est catégorique : une adoption généralisée de cette technologie n’est pas prévue avant la fin de la décennie[1]. Pourtant, depuis trois ans, le nombre de réseaux, d’appareils et d’utilisateurs de la 5G n’a cessé de florir, quelques 208 réseaux commerciaux de cette nouvelle technologie ayant déjà été déployés dans le monde. Parallèlement, les dernières estimations soulignent que le nombre d’utilisateurs de la 5G atteindrait 1,2 milliard d’ici la fin de l’année 2022. Cette demande de plus en plus forte semble ainsi souligner combien le réseau 5G apparaît indispensable à la transformation numérique mondiale. Dans ce paysage, l’Afrique occupe également une place de choix, cette technologie étant à même de jouer un rôle majeur dans sa croissance socio-économique.
La 5G, une nouvelle génération de l’Internet mobile aux côtés de la 4G
D’après les chiffres récents annoncés par la GSMA, le réseau 4G devrait atteindre 30% des connexions à l’Internet mobile d’ici à 2025, la 3G restant alors majoritaire avec 57% des connexions[2]. Au regard de ces pourcentages, certaines voix s’élèvent, s’interrogeant sur l’utilité, voire la nécessité de déployer une nouvelle technologie telle que la 5G quand les deux générations de réseau précédentes ne sont toujours pas à l’heure actuelle entièrement déployées sur l’ensemble du continent africain.
A ceci, il convient d’opérer une distinction entre les usages de la 4G et ceux de la 5G, leur application étant relativement différente, chacune répondant aux grandes mutations que connaît le continent africain depuis quelques années. En effet, la première a contribué à considérablement augmenter les échanges entre les utilisateurs, le téléphone mobile – notamment le smartphone – ayant connu une forte adoption ces dernières années. Le besoin en connectivité a tout particulièrement connu une croissance exponentielle depuis la crise de la Covid-19. A titre d’exemple, le nombre d’utilisateurs mobiles dans notre région, chez Huawei Northern Africa, est tout à fait symptomatique de la forte demande de connectivité. Dans les 28 pays dans lesquels nous opérons, sur une population totale de 670 millions de personnes, nous avons recensé, en 2021, un taux de pénétration des utilisateurs mobiles d’environ 45%. Ce pourcentage est conséquent et vient parallèlement illustrer l’augmentation progressive du nombre de données et, de facto, de leur trafic sur le continent. Dans ce contexte, la 4G apparaît davantage en mesure de supporter cette croissance au détriment de la 3G, dont l’utilisation ralentira progressivement dans les prochaines années.
La 5G est quant à elle porteuse d’un fort potentiel, étant dans un premier temps destinée aux usages de l’industrie, tout en facilitant la connexion des foyers via un Internet fixe. En effet, l’ultra haut-débit représentera 10% des abonnements Internet mobile en 2027[3]. Or, la croissance de son taux de pénétration de 10% aura comme retombée une augmentation de 2,5% du PIB par habitant[4], offrant dès lors de nouvelles perspectives pour le développement socio-économique de l’Afrique.
L’avènement, certes timide mais progressif, de la 5G doit donc se faire en parallèle de l’adoption de la 4G, et ce, dès maintenant.
Levons les obstacles afin de prendre pleinement le train de la 5G en Afrique
Avec l’avènement, certes timide, de la 5G, une nouvelle décennie de croissance pour l’économie numérique semble s’ouvrir en Afrique. Cependant, une combinaison de facteurs empêche le déploiement optimal de la 5G en Afrique.
La faiblesse des infrastructures numériques explique premièrement ce biais. Si cela est notamment le cas dans les zones rurales, – traditionnellement moins bien desservies que les territoires urbains car mal raccordées au réseau national -, il est également primordial de renforcer la connectivité dans les espaces urbanisés où Internet est considéré comme un service de base. En effet, 60% de la population africaine résidera en métropole d’ici moins de 30 ans, contre 39% en 2021[5]. Se posera dès lors la question des smart cities pour accueillir cette forte densité de population, tout en répondant aux Objectifs de Développement Durable (ODD) des Nations Unies. Les smart cities constituent à ce sujet un exemple éloquent, la technologie 5G pouvant allouer les ressources réseau à différents scénarios d’utilisation (le transport, la gestion du trafic, la gestion de l’énergie, etc.) afin de répondre aux services des plus modernes qui qualifieront ces villes intelligentes.
Cependant, le déploiement, puis la pleine maîtrise de la technologie 5G ne pourra se faire sans la mise en place de programmes de formation dans le secteur numérique. Relever les défis qu’impose le développement progressif de cette nouvelle génération de réseau implique donc de démocratiser l’apprentissage dans les nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC). Ceci étant, les populations seront elles-mêmes en mesure de prendre en main leur avenir numérique et ainsi d’être pleinement actrices de cette Quatrième Révolution Industrielle africaine. Afin d’accompagner les États sur le chemin de l’industrie 4.0, Huawei a déployé tout un ensemble de programmes d’apprentissage. En Égypte, nous avons par exemple déployé le projet de talents iTB, formant ainsi les jeunes diplômés dans les domaines technologiques les plus avancés que sont l’intelligence artificielle (IA), le cloud, l’Internet des Objets (IoT), ou encore la 5G.
Ce projet, mené de concert avec le gouvernement égyptien et les universités locales, témoigne du succès de la coopération menée entre les acteurs privés et publics en Afrique. Il vient ainsi souligner l’idée que le déploiement pérenne de la 5G ne pourra avoir lieu sans une coopération accrue entre les différents acteurs opérant dans l’écosystème numérique et c’est ce pour quoi nous militons chez Huawei. Les États ont un rôle crucial à jouer dans l’essor du réseau 5G, à la fois en termes d’investissements, mais également en termes d’instigateurs et de facilitateurs de la mise en place de politiques publiques. L’instauration de réglementations permettant l’implantation de nouveaux appareils connectés est nécessaire car, faute de cette préparation légale, le train de la 5G sur le continent africain sera soumis à quelques embûches.
Définir des plans à long terme de développement du très haut débit requiert donc de préparer les esprits en amont. A ce titre, une mobilisation de tous les acteurs, – les États, les équipementiers, les opérateurs et la société civile -, sera nécessaire et marquera ainsi pleinement l’entrée du continent dans l’ère de l’industrie 4.0.
Par Philippe Wang, Vice-Président exécutif de Huawei Northern Africa
[1] « Feuilles de route pour l’attribution du spectre 5G : Afrique subsaharienne », GSMA, septembre 2021.
[2] « 5G en Afrique : comment Huawei prépare le terrain », Jeune Afrique, octobre 2022.
[3] « Afrique subsaharienne : 78% des abonnements Internet mobile seront du haut débit en 2027 (Ericsson) », Agence Ecofin, juillet 2022.
[4] « Internet en Afrique : dix ans d’évolution, d’impact sur la vie de millions de personnes, mais aussi des défis », We Are Tech Africa, avril 2022.
[5] « Développer les smart cities pour bâtir l’Afrique durable de demain », Afrique IT News, juillet 2021.