YouScribe est une plateforme e-commerce et edtech qui connaît une croissance remarquable sur le continent. Afrique IT News a eu l’occasion d’échanger, au sujet de ce succès, avec Anne-Sophie Steinlein. La Directrice des opérations de YouScribe explique comment la plateforme compte tirer parti des opportunités du marché africain. Entretien.

YouScribe existe depuis plus de 10 ans, quels ont été les grands défis à relever jusqu’à maintenant ?
Anne-Sophie Steinlein – YouScribe a la particularité d’être une startup qui a une certaine histoire. Les défis de notre développement ont été multiples. Notre première volonté a été d’abord de rendre l’écriture accessible. Cela se retrouve d’ailleurs dans le nom. YouScribe a été à l’origine une sorte de bibliothèque participative, un YouTube du document. Nous voulions, au-delà de donner la possibilité aux jeunes auteurs ou aux personnes qui souhaitaient partager leur mémoire, leur thèse de doctorat, leurs notices d’utilisation, ouvrir nos portes à tous les écrits. Notamment les écrits publiés par les éditeurs parce que nous pensons que le livre, aujourd’hui, suit un mouvement de digitalisation. Le taux de pénétration des smartphones a beaucoup augmenté et le numérique, à une époque où les réseaux sociaux ont pris beaucoup d’ampleur, est un bon moyen de donner accès à la lecture. Nous avons effectué notre pivot le plus important en 2017, lorsque nous étions invités à l’événement “Conakry capitale du livre” par l’UNESCO. Nos observations lors de ce rendez-vous ont été comme une grande révélation. Nous avons remarqué que YouScribe pouvait être d’une grande utilité dans un contexte où n’y avait pas forcément de librairies très accessibles et surtout dans des contextes où les livres sont chers alors qu’il y a une grande envie d’apprendre, d’augmenter ses chances de réussite dans le milieu professionnel et sur le plan scolaire. Et l’un de nos grands défis à ce moment-là était de voir comment réussir le pari de l’accessibilité.
Notre grand défi a été de trouver comment créer un moyen de paiement pour que YouScribe soit accessible. Nous avons réussi à construire des partenariats avec notamment Orange, qui nous a permis de monter le modèle d’une bibliothèque numérique qui comporte plus d’un million de produits : des livres, des audios, des titres de presse, des documents pédagogiques, des bandes dessinés, des podcasts. Tout cela au sein d’une même offre, grâce à un abonnement qui permet d’accéder à tous les produits via un paiement par sms. L’autre défi, très technologique, a été l’implémentation de ce moyen de paiement, ce micro-paiement à la journée, pour accéder à la bibliothèque. Le premier pays dans lequel nous avons lancé ce modèle-là a été le Sénégal avec des premiers succès. Les lecteurs sénégalais sont effectivement au rendez-vous et en moins de 3 ans, nous avons dépassé le million d’abonnés sur la plateforme.

Maintenant que vous êtes parvenus à conquérir le million d’utilisateurs, comment appréhendez-vous le futur ?
YouScribe s’est déployé dans 10 pays. Le Sénégal d’abord, un de nos pays phares, puis la Côte d’Ivoire, le Cameroun, le Burkina Faso, le Mali. Nous sommes également présents en RDC. Nous avons aussi lancé notre première offre en anglais, en Afrique du Sud. Notre volonté est de toujours rendre accessibles nos produits. Nous avons trois pistes de croissance majeures. La première, c’est de continuer notre développement dans plus de territoires et d’être présent en Afrique de l’Est, en Afrique australe, dans des territoires qui n’ont pas encore accès à ces solutions de lecture. Notre deuxième axe de développement demeure le renforcement de notre présence dans les pays où nous sommes déjà bien implantés, notamment via des collaborations rapprochées avec les éditeurs de livres et presse. Au Sénégal, par exemple, nous travaillons d’ores et déjà avec une dizaine d’éditeurs, et notre volonté est de diversifier nos partenariats. De manière générale, nous travaillons avec Orange, MTN, Canal et d’autres opérateurs. Le troisième axe de développement est la diversification des moyens de paiement notamment avec le wallet. Nous voulons travailler cette diversité d’accès à la bibliothèque, que cela soit avec des moyens de paiement comme les wallets ou des partenariats avec des universités ou des écoles qui peuvent payer l’accès pour leurs élèves et étudiants.
Pensez-vous qu’il y a un dynamisme du livre en Afrique ?
Oui, il y a indéniablement un dynamisme. Des maisons d’édition sont créées toutes les semaines. Nous sentons une envie d’auteurs, de jeunes talents, qui se révèlent. Nous avons lancé il y a deux ans un concours d’écriture, qui s’appelle Le trophée des plumes, et des centaines de participants répondent présent chaque année, avec des milliers de votes venant du public. Nous sentons à la fois que les auteurs sont présents, que les lecteurs sont présents et que les éditeurs sont là pour développer la richesse de l’édition africaine. C’est également l’occasion de dire que le prix Goncourt 2021 a été coédité par une maison d’édition sénégalaise, Jimsaan. De notre côté, chez YouScribe, nous remarquons une volonté et un engagement de la part du milieu du livre.

En plus des livres, ciblez-vous d’autres secteurs ?
Nous travaillons sur le livre mais tout ce qui a trait à l’écrit. Le livre audio a un potentiel énorme que nous souhaitons développer, notamment par l’intégration de podcasts dans l’offre. C’est un axe majeur de notre activité qui va se développer. La presse constitue aussi un axe, que nous voulons activer, au-delà de thématiques très diverses comme le divertissement, l’éducation, le développement personnel, mais aussi la presse sportive qui est très prisée en Afrique. Nous avons de grands projets pour cette nouvelle année, notamment pour améliorer la qualité du contenu. Nous voulons renforcer notre présence au niveau du secteur éducatif. Car notre volonté, c’est de vraiment perfectionner cette bibliothèque de poche et de mettre en exergue la notion d’accessibilité. Nous espérons qu’il y aura de belles nouvelles et de bonnes surprises qui seront présentées.
Infographie-Youscribe