Le moins que l’on puisse dire, c’est que les organisateur du « plus grand événement gastronomique et culturel qui réunit les braiseurs de Côte d’Ivoire » ont le goût du risque.
La crise sanitaire qui a ébranlé toutes les économies, impacte durement le secteur de la promotion événementielle, qui est l’un des plus touchés. À cause des mesures barrières prises par les gouvernements dans le but de contenir la propagation du coronavirus, nombreux sont les salons, réunions, sommets, concerts, matches, spectacles, rassemblements et festivals qui ont été annulés à cause de la distanciation sociale.
Pour limiter la casse et ne pas laisser leur exercice 2020 passer à la trappe, de nombreux promoteurs se sont tournés vers les technologies de l’information et de la communication. Tous les événements légaux qui ont eu lieu envers et contre tout se sont tenus en ligne. Cependant, le passage au virtuel ne représente pas le même potentiel pour tous les types d’événements.
Si les sommets de Chefs d’Etats, les levées de fonds, les présentations de produits ou encore les colloques ont pu valablement tirer parti d’Internet et des outils de vidéoconférence comme Zoom, Teams et Google Meets, les grands rendez-vous d’univers comme le divertissement et la gastronomie ont préféré accuser le coup et attendre des lendemains meilleurs. Une grande part de l’intérêt qui leur est porté se trouve dans l’ambiance que crée la présence et les interactions des participants, rassemblés en masse dans un lieu bel et bien physique.

C’est à cette catégorie qu’appartient le Festival des grillades d’Abidjan (FGA). C’est un des événements les plus populaires de Côte d’Ivoire. Tenu pour la première fois en 2007, il doit sa pérennité à un concept qui a clairement fait ses preuves : attirer des milliers de personnes en réunissant, pendant deux jours, les meilleurs spécialistes en grillade de la capitale et les artistes musiciens en vogue. C’est sans mentionner les divers autres éléments d’animation.
Les festivaliers se rendent au palais de la culture, le temple local du spectacle, en couple, en famille et/ou entre amis, pour manger, boire et danser tous ensemble. Autant de choses qu’ils peuvent faire ailleurs, surtout que c’est souvent difficile de se garer, de trouver une table libre et qu’on n’est pas à l’abri des pickpockets.
Il est donc plus que surprenant d’apprendre que l’édition 2020 aura lieu les 12 et 13 septembre. L’annonce a été faite le 20 août, lors d’un point de presse. Les promoteurs ont refusé l’année blanche et réinventé le concept du FGA. Les différentes animations du festival seront virtuelles et suivies en direct par les fans. Pour ce qui est de la nourriture, les gens pourront commander leurs plats à distance et se les faire livrer là où elles se trouvent.

L’innovation est vraiment radicale. On comprend bien que tout a été fait pour s’adapter à la situation. Toutefois, des inquiétudes légitimes sont à soulever. Il est certain que les Abidjanais ont plus envie de passer du bon temps dehors plutôt que chez eux. En témoigne l’enthousiasme suscité par la réouverture des bars et boîtes de nuit. Après plusieurs mois de confinement, ils ont besoin de prendre l’air. Le nouveau concept n’est pas de nature à satisfaire cette exigence.
Par ailleurs, les populations sont très attachées aux festivités traditionnelles du FGA. Un internaute s’est exprimé en ces termes sur la page Facebook de l’événement :
« Excusez moi du thème on ( ne peux pas embrasser sa chérie virtuellement et être heureux Walaye c est faux ) le FGA est comme pour tout Abidjan et ivoirien un amour 💕 une femme 👩 et un homme 👨 avec lequel on veux se tenir main dans la main 👫 corps pour corps …Le FGA est plus que covid19 si on ne le célèbre comme toujours beaucoup seront malade ,triste 🙏🙏🙏 »
La quasi-totalité des réactions sont dans la même veine. Les individus ne sont pas séduits du tout et beaucoup ont l’impression qu’un symbole qui leur est cher va être dévoyé.
Les promoteurs sont sûrement conscients que leur choix représente un véritable saut dans l’inconnu. Pour maximiser leurs chances de succès, ils ont intérêt à communiquer énormément afin de rassurer les festivaliers et changer leur perception concernant l’édition de cette année. Un exercice qui s’annonce compliqué.
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